2022-06-16 Turar Rysqulov – Shymkent

Une promenade de santé mais des petites grimpettes quand même…

On pourrait presque dire que c’est un trajet sans histoire… mais quand il n’y a pas d’histoire, on s’en raconte de façon totalement involontaire.

C’est souvent le propre des activités répétitives ne demandant pas une très grande concentration : l’esprit vagabonde.

Et quand on est justement en train de vagabonder sur des chemins de traverse, l’esprit s’échappe puissance deux !

Donc ce matin, six heures trente je descends prendre mon petit déjeuner frugal avant de monter sur le vélo.

L’administratora à qui j’avais donné un œuf hier pour le cuire me l’amène prêt à l’emploi avec une petite coupelle de sel.

Elle a ouvert la porte de la lingerie où mon vélo était enfermé.

C’est la perfection cette administratora !

Avant de partir la traditionnelle photo souvenir avec elle :

Hôtel Karima : à recommander !

Il fait très beau et, a six heures quarante cinq, la température est idéale.

Un bâtiment qui pourrait bien être la Mairie :

Sur près de dix kilomètres je traverse un très grand village-rue :

Ça roule vraiment bien ce matin, j’ai des ailes… mais pas pour grimper à toute allure les petits raidillons qui finissent par arriver :


Mon GPS Garmin ne créditera pas cette montée de plus de 7%…

Comme presque chaque matin j’ai écouté en boucle la chanson de Gaël Faye « Tôt le matin ». Cette chanson m’inspire et me colle à la peau. Je vous en copierai les paroles à la fin de cet article.

En haut de la dernière « vraie » montée un monument m’attend pour une petite pause :

Je n’ai pas photographié les bancs qui entouraient cette stèle… rudement bienvenus !

Je n’ai pas photographié non plus (c’était en plein effort de montée) ce troupeau de moutons qui a envahi la voie opposée (donc en pleine descente) provoquant l’arrêt en panique de dizaines de voitures et camions.

Je trouve ça rassurant car s’ils font tant attention à ne pas écraser de moutons (alors que je sais maintenant le sort qu’on leur réserve quand j’arrive à l’improviste dans une famille) je me dis qu’un cycliste français méritera autant de prévenance de leur part 😉

Je quitte l’autoroute A2 pour une route qui traverse toute une série de villes-villages. Je pensais être un peu plus tranquille mais les automobiles se multiplient comme des petits pains et c’est comme la rue de Rivoli en Vélib… il faut slalomer entre bus et voitures.

Je trouve un long trottoir qui me sert de piste cyclable et, profitant d’un peu d’ombre, je fais une dernière pause avant d’arriver à Shymkent :

Dernière pas tout à fait car une abeille ou une guêpe qui s’est fait coincer dans mon casque me pique sur le crâne. Sous l’effet de la surprise je m’arrête en catastrophe. Je ne trouve pas la coupable mais la douleur, si elle est intense, est très brève.

Donc arrivée à Shymkent, sa statue du chevalier inconnu :

Batyr d’Akpan (c’est du Kazakh)

Et à onze heures trente j’arrive dans mon petit hôtel communeautaire où nous sommes deux dans une chambre de six.

Donc un trajet plutôt rapide (pour moi) en évitant de justesse la chaleur qui se renforce nettement à partir de midi.

Après la douche et un déjeuner dans un restaurant-café du quartier, je vais faire un tour au bazar (je cherche une pièce à ajouter à la collection de couvres-chef de mon ami Jean-Louis).

C’est un vrai bazar : chaussures, jeans, sous-vêtements, robes d’apparat, casquettes, jouets, gadgets électroniques..,

Et bien sûr des fruits, des légumes, de la viande, du miel…

Emplettes terminées je rentre alors que le thermomètre se met à l’unisson de la canicule en France : il fait 36° cet après-midi.

Dans une ville de plus d’un million d’habitants comme Shymkent, avec un gros traffic de voitures, de camions et de bus, on a un peu l’impression de manquer d’air.

Shymkent comptait 160.000 habitants en 1959, 640.000 en 2012 et donc plus d’un million en 2020.

Sauf erreur depuis 1959 ça fait une augmentation annuelle moyenne de 3%

Au lieu de vous faire des calculs arithmétiques je ferais mieux de revenir un peu en arrière, à Taraz pour un point d’histoire que, personnellement, j’ignorais.

En 751 a eu lieu à Taraz une bataille importante entre les Chinois et les Arabes.

Les troupes de la dynastie Tang cherchaient à conquérir une partie de l’Asie Centrale.

La bataille de Taraz a eu lieu au bord de la rivière Talas, dans une zone qui est actuellement en territoire Kirghiz.

Les Chinois ont perdu cette bataille et les historiens pensent que c’est à cette occasion que le secret, jalousement gardé par les Chinois, de la fabrication du papier a été transmis aux Arabes qui ont dû un peu moins verrouiller le brevet puisque les Européens en ont hérité ensuite.

Donc le papier journal, celui des livres nous vient des conséquences de cette bataille livrée aux confins du Kazakhstan actuel.

Demain je vous parlerai un peu plus de Shymkent puisque je vais y passer la journée (musée, reportage photo…).

En attendant je vous livre le texte de Gaël Faye « Tôt le matin ». Cette chanson m’accompagne lors de chaque début d’étape.

Les mots de Gaël Faye donnent envie d’aller voir ailleurs. C’est un peu ce que je fais et quand il évoque d’immenses lacs émeraudes au bord desquels on ouvre de grands yeux clairs, alors qu’on pédale le long du lac Balkhash, forcément on se sent en osmose avec lui.

Si vous ne connaissez pas Gaël Faye vous pouvez le découvrir, en dehors de ses chansons, par son livre « Petit Pays » (prix Goncourt des lycéens) où il évoque son enfance au Rwanda.

Tôt le matin

Respire les effluves, les parfums
d'Orient
Sous l'étuve les fumées d'encens
Brûle tes poumons dans les
torpeurs enivrantes
Hume les fleurs, leurs senteurs
navrantes
Laisse loin la rumeur des villes
Si ta vie est tracée : Dévie!
Prends des routes incertaines,
trouve des soleils nouveaux
Enfile des semelles de vent,
deviens voleur de feu
Défie Dieu comme un fou, refais
surface loin des foules
Affine forces et faiblesses, fais de
ta vie un poème
Sois ouragan entre rebelles,
houngan!
Empereur de brigands, Mackandal,
Bois-Caiman
Écris des récits où te cogner à des
récifs
Une feuille blanche est encore
vierge pour accueillir tes hérésies
Lis entre les vies, écris la vie entre les lignes
Fuis l'ennui des villes livides si ton cœur lui aussi s'abîme
Un jour, un jour, un jour j'me barre,
hasta la vista
Je reste pas sur place, j'attends
pas le visa
J'vais parcourir l'espace, pas rester
planté là
Attendant que j'trépasse et parte
vers l'au-delà
Mourir sous les étoiles, pas dans
de petits draps
J'vais soulever des montagnes
avec mes petits bras
Traverser des campagnes, des
patelins, des trous à rats
M'échapper de ce bagne, trouver
un sens à tout ça
J'vais rallumer la flamme,
recommencer I'combat
Affûter ma lame pour replonger en
moi
Un fantôme se pavane dans son
anonymat
Rêve d'un pays d'Cocagne où l'on
m'attendrait la-bas
Car dans la ville je meurs à nager
dans des yeux
Des regards transparents qui me noient à petit feu
La zone est de mépris, la vague est
d'indifférence
La foule est un zombie et je vogue
à contresens
Entendre le son des vagues
lorsqu'elles s'agrippent à la terre
ferme
Cultiver le silence, tout est calme,
plus rien n'interfère
Rechercher la lumière, un jour
peut-être trouver la clarté
En nous le bout du monde, faire de
son cœur une île à peupler
Ouvrir de grands yeux clairs au
bord d'immenses lacs émeraudes
Se laisser émouvoir tôt le matin
quand pousse l'aube
Aux premières heures du jour tout
est possible
Si l'on veut reprendre dès le début,
redéfinir la règle du jeu
Briser les chaines, fissurer la dalle
Inventer la lune, que tous la voient
Devenir vent de nuit, pousser la
voile
Et s'enfuir vers des rives là-bas

5 réflexions sur « 2022-06-16 Turar Rysqulov – Shymkent »

  1. Tu te rapproches de nous! Bientot la frontiere. Si tu as un souci avec les garde-frontieres, telephone moi et j’arrive. Mais tout devrait bien se passer, il sont gentils.
    Je viens de telecharger la chanson de Gael Faye, que je connaissais pas.

    Aimé par 1 personne

    1. Il y a certaines frontières qu’on ne peut passer en vélo, il faut être dans une voiture, un bus ou un camion. Je verrais bien si j’ai des difficultés mais à priori il n’y a pas de raison. Je pars demain matin pour une étape de 50/60 km. Je devrais donc être à Tashkent après demain dans l’après-midi si tout va bien. 😎🤩

      J’aime

  2. Je charge la chanson et prend mon vélo…on sait jamais j’aurais peut etre des ailes…en attendant la mélodie j’ai beaucoup aimé le texte et comprend que ta mise en route du matin soit facilitée. Bises à toi Stephane.

    Aimé par 1 personne

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