2022-06-27 Samarcande

La place de Registan à la tombée du jour

D’Alexandre le Grand à Corto Maltese, en passant par Gengis Khan, Tamerlan et toute la dynastie des Timurides, la cité de Samarcande a connu une histoire fertile en rebondissements, constructions, destructions, reconstructions, tremblements de terre.

Depuis la dislocation de la Russie soviétique et l’indépendance de l’ Ouzbékistan, la ville de Samarcande a surtout connu une période de rénovation de ses monuments historiques et le classement au patrimoine mondial de l’UNESCO.

De nombreux monuments, essentiellement des mausolées, qui étaient à l’état de ruines, ont été restaurés pour leur redonner leur lustre d’antan.

Des quartiers ont été rasés pour aérer la ville en les remplaçant par des jardins qui créent de véritables oasis de verdure.

Tout cela a été réalisé à l’instigation du premier président de l’Ouzbékistan après l’indépendance en 1991, Islam Karimov dont la statue est érigée dans le jardin qui jouxte l’ensemble de la place du Registan.

On retrouvera son influence à Chakhrisabz, la ville natale de Tamerlan.

Pour nous guider dans notre découverte de Samarcande, nous sommes accompagnés par Nasrulo Jumanov, ancien élève diplômé de l’institut des langues étrangères de Samarcande et assidu de l’Alliance française locale.

Nasrulo Jumanov

A peine arrivés à Samarcande, les bagages posés à l’hôtel, la visite commence par les mausolées proches de la nécropole de la ville. Après avoir traversé l’ancien quartier juif, nous arrivons au pied d’une colline qui sert toujours de cimetière. Après un escalier de quarante marches (en plein soleil 🥵) nous arrivons sur une enfilade de mausolées

Ce sont des sépultures de femmes et un saint descendant du prophète.

Certains de ces mausolées ont été restaurés et montrent des décors magnifiques :

Tous les hauts-reliefs sont réalisés en papier mâché et dorés à l’or fin. Des mosaïques qui recouvrent l’extérieur des mausolées ont été refaites en respectant les teintes d’origine.

Facade d’un des mausolées de la nécropole Chakhi-Zinda

Après les mausolées, la mosquée Bibi-Khanym

De la galerie couverte qui entourait la cour intérieure il ne reste rien. L’intérieur de l’arche principale n’est pas restauré :

L’urgence des restaurateurs a d’abord été de redresser les monuments qui pouvaient être sauvés, puis de protéger les extérieurs pour stopper les dégradations dues aux intempéries. Les restaurations des intérieurs se font ensuite.

Le dôme extérieur par contre est flamboyant

Bibi-Khanym : la coupole de la mosquée

Puis c’est l’ensemble des mosquées de la place du Registan. Le nom de cette place vient de son appellation d’origine « La place de sable ».

Cette appellation n’est pas sans rappeler la place de Grève à Paris, d’abord par la proximité des deux matières, mais aussi parce que la place de Sable était le lieu des exécutions publiques…

Le Registan est un ensemble de mosquées, de madrassa, de mausolées :

Lieu de rencontre des caravanes, caravansérails, lieu de prière, de justice, d’éducation, les plus grands savants, docteurs de la foi, y dispensaient leurs enseignements.

Mosquée Tilla-Kari

Ensuite nous nous dirigeons vers le mausolée de Tamerlan et des Timurides.

La sépulture de Tamerlan est entourée de son maître spirituel et de deux des petits-fils et deux arrière-petits-enfants

Tamerlan est le seul à être inhumé dans un cercueil car il est décédé lors d’un de ses voyages et son corps a été ramené à Samarcande, trajet qui a pu prendre deux mois.

La sépulture de Tamerlan (en pierre noire), entourée de son maître spirituel et de ses petits fils et arrière petits enfants
La sépulture de Sheikh Oumar, chef spirituel de Tamerlan, Soufi, à l’écart des autres catafalques
Les sculptures en papier mâché

Le lendemain matin en route pour Chakhrisabz, ville natale de Tamerlan.

La route s’élève jusqu’au col de Pereval, à plus de 1500 m d’altitude.

Vue du col vers la ville de Chakhrisabz
Nasrulo, Anne et Gios le chauffeur

Puis c’est l’arrivée à Chakhrisabz et l’entrée majestueuse du palais construit pour la mère de Tamerlan.

Une arche imposante qui culminait à… (je ne sais plus mais très haut en tout cas).

Un jeune peintre de Chakhrisabz a réalisé une maquette au 1/30 de la porte pour son diplôme des beaux arts

En regardant de près le chemin de ronde en haut de la façade vous pouvez voir deux gardes à l’échelle
Mosaïque d’un ancien bassin qui occupait une position centrale dans le jardin du palais.
Vue de la porte d’entrée depuis l’intérieur du palais

Une imposante statue de Tamerlan a été érigée au milieu de la place gigantesque qui a été libérée pour permettre une vue d’ensemble sur l’emplacement de l’ancien palais.

Le même peintre a réalisé un tableau reconstituant une vue d’ensemble du palais.

Reconstitution du palais Ak Saray

Puis nous arrivons au mausolée de Jahonghir, fils de Tamerlan qui est mort jeune, avant son père. C’est donc son fils Og’elbek qui a succédé à son grand-père (et qui a lui-même été décapité sur ordre de son fils, vous me suivez ?)

Le mausolée de Jahonghir
Le mausolée de Jahonghir
Le mausolée de Jahonghir
Le mausolée de Jahonghir
Mosquée Kok Goumbaz (mosquée dôme bleu)
Les quatre frères : mausolée Goumbazi-Sayyidon, descendants du Prophète

Après cette visite de la ville natale de Tamerlan, nous rentrons à Samarcande pour découvrir une fabrique de papier.

Même si cet atelier a une vocation touristique (un peu comme nos parfumeries grassoises…), c’est d’abord un petit retour en arrière sur mon passage à Taraz, au Kazakhstan.

Je vous ai parlé de cette bataille qui a opposé les Arabes et les Chinois sur le bord de la rivière Tasz au VIIIème siècle. Elle s’est soldée par une victoire des Arabes après que des mercenaires à la solde des Tang aient fait défection et rejoint les troupes Arabes.

La conséquence de cette défaite des troupes des empereurs Tang a été l’envoi de milliers de prisonniers chinois dans les territoires d’Asie centrale.

A Samarcande des prisonniers ont été employés pour construire des remparts pour la ville.

Parmi eux certains détenaient le secret, jusque là jalousement gardé par les Chinois, de la fabrication du papier.

Et le secret est ainsi passé du côté des Arabes, dans la ville de Samarcande, donnant naissance à une industrie prospère qui a perduré jusqu’au XXème siècle, le fameux « papier de soie de Samarcande ».

A l’origine de cette fabrication, le mûrier, cet arbre sur lequel se nourrit le bombyx du mûrier dont le cocon sert à réaliser le fil de soie.

C’est ce « tronc commun » aux deux produits, le fil de soie et le papier de Samarcande, qui a vraisemblablement créé cette appellation de « papier de soie », alors qu’il n’y a absolument pas de soie dans le papier de Samarcande.

Pour la fabrication du papier c’est l’écorce des branches de mûrier qui sert de matière première de base.

Lors de la récolte des bombyx, on en profite pour couper des branches de mûrier qui sont soigneusement entreposées :

Les branches sont ensuite bouillies pour décoller l’écorce :

Ensuite une opération manuelle permet de récupérer la partie intérieure de l’écorce

Les écorces sont soigneusement raclées afin de récupérer la fibre qui va servir pour réaliser la pâte à papier.

L’écorce est ensuite ébouillantée pour ramollir les fibres.

Ensuite c’est au pilon qu’on finit de déliter les fibres. Pour cela on utilise la force motrice d’une roue à aubes :

Un arbre à cames soulève les pilons…

Côté pilons les fibres sont écrasées

Ensuite les fibres trempent dans un récipient et c’est avec une louche qu’on les verse sur un cadre grillagé qui va conserver une couche de fibres. On pose un contre cadre pour emprisonner la matière fibreuse.

On laisse égoutter soigneusement et on décolle la fine couche de papier qui va ensuite sécher sur un panneau ad hoc.

On enlève la feuille encore humide du cadre pour la faire sécher sur le panneau.

Une fois séché la feuille de papier de Samarcande a un ton sépia,

Cette teinte permet de lire sans fatiguer la vue.

Une feuille de papier de Samarcande à côté de sa cousine industrielle du vingtième siècle.

Le papier de Samarcande peut ensuite être lissé, avec une pierre ou de la corne pour obtenir un papier couché.

Voilà comment Samarcande est devenu pendant plusieurs siècles une capitale mondiale de la production du papier…

Le siècle dernier a vu péricliter cette production qui vient d’être relancée pour garder la mémoire d’une époque prestigieuse pour la ville de Samarcande.

Samarcande le soir : la foule se presse dans les rues avec les attractions pour les enfants 🤗

Bye 😊

5 réflexions sur « 2022-06-27 Samarcande »

  1. Bonjour Stéphane, bien sur aussi amitiés à transmettre à Anne qui si j’ai bien compris a eu la bonne idée de te rejoindre. Profitez pleinement ensemble des splendeurs de Samarkande et environs. Tes multiples photos relancent inévitablement le désir d’y faire un tour.. Je reviens également quelques jours en arrière,…, qui sont tes amis Fabrice et Valéria ? Un Français en couple avec une jeune femme du cru ? Et qu’y font ils ?? Tu as stimulé ma curiosité…

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    1. Bonjour Henri,
      C’est vrai que c’est un pays au passé chargé d’histoires et qui a fait de très gros efforts pour réhabiliter son patrimoine. Tout est fait pour mettre en valeur des constructions qui sont toutes des œuvres d’art et d’architecture. Tout est fait pour attirer le regard jusqu’à élargir les perspectives en retirant parfois des quartiers entiers d’habitation et en les remplaçant par des parcs qui en plus agrémentent les visites par leur fraîcheur. Concernant Fabrice tu peux retrouver mon premier contact avec lui et sa famille dans les articles de mon blog en 2018 puisque Fabrice et Valeria m’avaient offert l’hospitalité quand je suis passé à Novossibirsk. Et effectivement Fabrice est un français venu s’installer en Sibérie où il a rencontré Valeria qu’il a épousée. Ils ont un « petit » garçon de 12 ans, Gaspar (il est plutôt grand 😊). Fabrice est consultant pour l’industrie pharmaceutique et Valeria donne des cours d’anglais à l’université.
      Depuis fin février ils sont venus s’installer de façon provisoire à Tashkent, mais Fabrice s’y plait beaucoup et ils apprécient leur villégiature ouzbek qui semble devenir à durée indéterminée.
      Mes amitiés à vous deux,
      Stéphane

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