Encore de la paresse (ou fatigue) mais ce matin je suis encore irrésistiblement attiré par la gare de Shu.
La perspective de trois étapes de steppe aride ne m’enchante pas et je voudrais me rapprocher de la frontière Kirghiz et de ses montagnes qui doivent un peu changer la ligne d’horizon.
Pour cela il faut se rapprocher de Taraz. Je décide donc de prendre un billet pour Uch-Bulak qui était mon étape avant Taraz.
Au guichet de la gare, la préposée fait des recherches dans tous les sens : ou la gare d’Uch-Bulak a disparu ou elle est désaffectée ou… je ne sais pas. C’est peut-être une gare pour les trains de marchandises qui sont nombreux.

Donc, plan B, un billet pour Taraz пожалуйста (prononcez « pajaolsta » pour s’il vous plaît). Ça c’est possible : départ à 11:45 pour une arrivée à 15:00 , mais soyez là à 11:20 (elle me l’écrit à la main sur un papier pour être sûre que j’ai compris).
Ça me laisse 3 bonnes heures pour prendre un petit déjeuner, ranger mes affaires et traverser la place de la gare (mon hôtel est juste en face).

Un jeune garçon semble très intéressé par mon vélo chargé, prêt à prendre le train :

A onze heures moins cinq je tente une entrée dans la gare.
Avec le plan vigi-cycliste à l’entrée de la gare mon vélo et moi sommes d’abord refoulés pour le passage du portillon de contrôle…
Je montre mon billet, on appelle un haut gradé et hop je passe sans fouille…
Dans la gare on me demande de me poser loin des autres passagers (pourtant j’ai pris une douche ce matin).

Onze heures vingt, message au micro : tout le monde se précipite vers le quai ( qui fait la largeur d’un terrain de foot).
Le soleil tape fort, tout le monde s’agglutine sous l’abri d’un auvent. Le petit garçon avec sa mitraillette en plastique (et une tenue camouflage) perce les oreilles de tout le monde, mais personne ne lui dit rien (moi non plus…).
Nouveau signal au micro, le train entre en gare, c’est le rush vers le bord du quai où chacun cherche son wagon.
Ne sachant pas quel est mon numéro de voiture, je remonte le train vers l’avant et je passe devant un marché aux fruits et légumes que je photographie en vitesse :

Devant chaque voiture un provonitsa (chef de wagon), contrôle les billets. Je montre le mien à un provonitsa qui ne semble pas trop occupé et qui est habillé comme un chef d’état-major de l’armée russe (j’aurais vraiment dû le photographier…). Sa casquette est impressionnante, je suppose que je suis devant une voiture de 1ère classe supérieure !
Il me met gentiment entre les mains d’un chef de quai qui me fait remonter le train fissa-fissa vers l’arrière. Arrivés à la voiture 12, mon chef de wagon un peu moins chamarré que son collègue des premières classes m’indique une porte (secrète) à l’arrière du wagon et retourne à l’intérieur pour l’ouvrir.
Je lui passe mes sacs et le vélo, le tour est joué.
J’avoue que je craignais un peu l’embarquement du vélo (et même tout simplement le fait qu’il soit accepté…). Mais là c’était comme sur des roulettes 🤩.
Une fois dans le train je me couche a ma place.

J’ai hérité d’une place en hauteur dans un train qui doit circuler la nuit et donc tout le monde est allongé sur des couchettes.

Ce train est un vaste restaurant : tout le monde mange, des salades, des soupes, des plats de viande… ça sent bon et ça met l’eau à la bouche. Pour accompagner ce festin sur rail, j’ai prévu une pomme !
Je lis et je somnole… (je ne sais pas si je vous ai recommandé la lecture du livre de Thierry Frémaux « Judoka » ? Mais je le fais maintenant 😊).
Le train passe devant un aérodrome avec des appareils qui semblent un peu vétustes :

On approche de Taraz et le paysage a complètement changé : tout est vert, il y a de grands arbres, des peupliers d’Italie…
On passe même au dessus de ce qui ressemble à un fleuve (une vraie grande rivière, la rivière Talas).
A l’heure prévue c’est l’arrivée à Taraz.
Vélo récupéré, je prends la route vers un lieu que j’ai tenu secret jusqu’à présent (sauf dans le titre) : le paradis.
Personne ne peut vraiment certifier qu’il existe réellement et, en descendant du train je n’en sais encore rien de certain.
J’avais juste repéré, en préparant mon voyage, un endroit dénommé « oasis Aire de loisirs « Sholdala » » à une petite vingtaine de kilomètres de Taraz.
Je me mets en route vers ce lieu mystérieux.
Comme je n’ai pas déjeuné je m’arrête pour une brochette d’agneau dans un petit restaurant fort sympathique avec des petites tonnelles de verdure où on est parfaitement isolé des autres convives :

Le serveur est amusé par ce visiteur à vélo. Il est vraiment serviable et je lui demande s’il peut appeler cette aire de loisirs. Pas de réponse au numéro de téléphone trouvé sur Google Maps.
Je tente ma chance en créant un nouveau contact Whatsapp avec ce numéro et j’envoie un message en anglais (et traduit en russe) pour demander s’il est possible de dormir sur place).
Pas de réponse.
Je quitte le restaurant mais avant de reprendre la route je fais un petit coucou à ma belle-maman Josette qui fête ses 94 ans avec toute la famille réunie à Paris (sauf moi…).
En raccrochant de cet appel je vois que mon message Whatsapp a reçu une réponse et qu’un certain Adal a répondu en donnant un autre numéro à appeler de sa part.
Retour au restaurant et nouvelle tentative de contact par l’entremise du serveur, toujours aussi sympa.
On répond au numéro mais la conversation semble un peu confuse et ça raccroche sans qu’il y ait eu d’information utile..,
Tant pis je roule en direction de cette oasis hypothétique.
Sur la route partout des champs cultivés, des canaux d’irrigation, de la verdure :
Le temps commence à s’assombrir, de gros nuages commencent à obscurcir l’horizon mais on distingue quand même assez nettement une chaine de montagnes enneigées…
Quel contraste avec cette steppe aride traversée ces derniers jours !
Je passe devant une mosquée bien indiquée sur mon plan pour arriver directement sur la voie ferrée qui doit filer vers Almaty ou Tashkent !

Pas de passage à niveau, pas de souterrain en vue, je suis obligé de franchir les voies en portant le vélo au dessus des rails, des traverses en béton et du ballast (je n’ai pas pris le temps d’une photo, désolé pour l’information incomplète).
Je demande ma route à un passant qui ne connaît pas de centre de vacances dans les environs. Il m’indique un magasin et sa gérante elle connaît. C’est à quelques centaines de mètres à gauche.
J’accélère la cadence pour éviter la pluie qui commence à tomber et j’arrive au paradis 🤩

Quand j’arrive je suis accueilli par un personnage qui me fait signe d’attendre un peu.
Je l’entends gronder à l’intérieur de ce que je pense être le bureau de l’administrateur et quelques minutes plus tard un jeune garçon de moins de 15 ans vient vers moi et me dit deux mots en anglais, langue qu’il maîtrise à peine mais c’est normal étant donné son âge.
Arrive ensuite une jeune femme qui parle parfaitement l’anglais.
Elle me dit qu’on va me loger, que pour dîner il n’y a pas de problème.
Elle me conduit dans un appartement duplex avec trois chambres à l’étage, m’en fait choisir une et le fait visiter tout l’appartement qui comporte au rez-de-chaussée un séjour, un coin cuisine (qui n’est pas encore équipé), buanderie, entrée, vestiaire, salle de massage nº1, salle de massage nº2, piscine intérieure attenante à un superbe bania et une autre salle de massage !
Et dès mon arrivée c’est un ballet pour faire le ménage, m’apporter une boisson, des fruits, préparer la salle de bains…
J’ai l’impression que tout le monde se met en quatre, c’est impressionnant.
A peine ai-je eu le temps de poser mes affaires que je suis convié à dîner avec le maître de maison, sa fille, un neveu et son petit-fils.
J’apprends que Zhapar , le propriétaire, a un grand restaurant à Taraz et qu’en raison du Covid il a décidé de faire ce centre de réception et de vacances pour que des convives puissent y manger en plein malgré la pandémie.

Sa fille Aïcha est architecte d’intérieur « feng-shui ». Elle habite Nur-Sultan mais elle travaille avec et pour ses parents en décorant et supervisant certaines réalisations comme une toute nouvelle salle de réception qui jouxte une piscine intérieure gigantesque.
Le repas terminé, Zhapar m’emmène faire un tour de son « jardin ». Sur près d’un hectare c’est une profusion d’arbres fruitiers : beaucoup de pommiers (des espèces européennes), quelques poiriers, amandiers, noisetiers, vigne, cerisiers… j’en oublie certainement.





Puis le potager…

Puis un tour rapide de la partie « centre de loisirs ».
Une succession de petits étangs, de kiosques avec des barbecues…







Demain on continue la visite : je reste au paradis 🤩
Salut Stéphane, ç est vrai ton paradis est tentant 😇
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ah enfin un étape que j’aurais pu faire avec toi et en plus elle finit au paradis 🙂
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Ça a l’air bien sympa et verdoyant, profites en bien !
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Le contraste avec ces derniers jours est saisissant ! Profites-en bien 👌
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J’ai toujours rêvé de prendre un « train de nuit » de jour ! Bonne continuation Stéphane.
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La route continue… autre endroit autre « famille d’accueil » : on vient d’égorger le mouton, c’est aussi très « couleur locale » !
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